HORIZON NOIR
C’est ton moment, le plus égoïste.
Saluons l’instant et ton entrée en piste !
T’es beau en couleur, dans ton paséo,
on dirait une fleur
mais je trouve que tu manques d’eau.
Seras-tu seulement à la hauteur de l’événement ?
C’est un art d’enlever un cœur…
« C’est ma vie ma foi ; le ballet des muletas, la bronca
y la banda, la corrida »
Tu m’jettes du sable, tu regardes en l’air,
pauvre misérable, elle est pure, cette terre.
Ma mort est certaine et sans effort,
toi tu te dis qu’on t’aime
que t’es le plus grand des matadors.
On m’a piqué avant d’entrer,
tu sais histoire de m’exciter,
mais la chaleur de cette journée
m’a usé et j’suis entamé.
Tu veux que j’tourne alors tournons,
tu veux que j’danse alors dansons,
mais tu te caches pauvre garçon.
Et comme un lâche ;
Y’a des fausses notes dans ta chanson !
Je sortirai coulant de larmes,
plein de trous et tout en sueur,
pendant que la folie des âmes
t’acclamera avec ardeur.
Et tu feras rougir les femmes,
les enfants auront de la peine,
tu rêves de châteaux en Espagne.
Tu es bien le roi de l’arène !
Si le spectacle et mes oripeaux
en valaient vraiment la chandelle,
à la fin de mon numéro
m’accorderiez-vous un cérémonial ?
Il est trop tard et je n’en peux plus
la mort avance sur le terrain,
ce face-à-face est déjà perdu.
Vas-tu enfin me tordre les reins ?
En mon honneur et à ta gloire,
au taureau et à son bourreau,
mon horizon devient tout noir,
je perds pied et je tombe de haut.
Je vois pourtant les mouchoirs blancs,
quelle ironie ô matador ,
ton soir entaché de mon sang,
c’est ta victoire…
Et je suis mort !