L'argent
Jourdain, bourgeois tu montes, montesLes barreaux de l'échelle d'or.Tu as déjà prêté au comte.Demain tu feras mieux encore.Après l'avoir mis sans chemise,Après l'avoir mis à genoux,Bientôt le comte et la marquise,Tu leur feras couper le cou.L'argent ne sert pas à paraître.L'argent sert à faire de l'argent.N'imite pas tes anciens maîtresMais prends leur place et vivement.Surtout, n'aie pas peur de la guerre.Ce sont les autres qui la font.Verse ton pleur, fais ta prière.C'est bourré d'or dans les canons.Vends le coton, troque la laine :Faut spéculer dans les salons.Laisse mourir à Sainte-HélèneNapoléon, Napoléon.L'argent ne sert pas à paraître.L'argent sert à faire de l'argent.Fais leur penser qu'ils sont les maîtresEt change les quand il est temps.Si revient, le temps des cerisesLaisse faire à tes généraux.Ils sauront écraser la criseQui t'a fait peur au mai nouveau.Tout au fond du Père LachaiseNous restons entre honnêtes gens.Les morts retournent à leur glaiseEt tu retournes à ton argent.L'argent ne sert pas à paraître.L'argent sert à faire de l'argent.Tu es le véritable maître.C'est toi qui fais les présidents.T'as ramassé dans la poubelle,Pour écraser les meurt-la-faim,L'homme noir aux yeux d'étincellesEt puis il est mort à Berlin.Pendant que s'écroulait le mondeToi, toi, tu gardais dans tes mainsTout l'or de notre terre au mondePour aujourd'hui et pour demain.Hier, demain, l'argent est maître.Jourdain, tu l'as et pour longtemps.Paraître ou bien ne pas paraître.Ça tu t'en fous éperdument.Hier, demain, l'argent est maître.Jourdain, tu l'as et pour longtemps.Paraître ou bien ne pas paraître.Ça tu t'en fous éperdument.