Lettre à Charlot
Objets inanimés, avez-vous donc une âme?
Qui s'attache à notre âme et
Qui la fait vibrer
Les hommes de mon âge Charlot figent la
Nature et les choses de la nature
Ils verrouillent les moindres caprices
De la vie parce
Qu'ils ont peur d'être troublés
Dans leur sommeil
Ils ignorent que la gorge des gars de ton âge
C'est comme une serre chaude
Par où s'enfoncent nos
Nuit's blanches que le sourire des
Fillettes de ton âge
C'est comme le bonheur des fleurs à genou
Les hommes de mon âge Charlot
Contournent les bras de
La mer pour le ciment des villes mortes
Ils ont planté dans leur
Mémoire l'apparence d'un seul
Jour qu'ils n'ont plus jamais
Remis en question
Ta jeunesse, Charlot
C'est l'interminable que nous avons oublié
Je me demande encore, Charlot
S'il est vrai que restent nos
Corps après nos âmes
Tu as peut être dans tes bras la
Grande équation de la vie où le
Corps après l'âme continue la cueillette de
L'espoir dans les granges du matin
Demain, vois tu Charlot
Vous serez rendu chez les grands
Parlerez-vous seulement des juges
Des tavernes et des bordels de chez nous?
Car à votre tour
Vous tiendrez des grands soirs de feu de bois
(en pensant aux pionniers des plus
Belles folie de la terre)
En vous disant que tout ce langage
Est à refaire marijuana et LSD
Tout est à refaire Charlot
Reconnais Charlot
Les mains de la rosée
Le vol d'oiseau des jours
La jambe d'une flamme jaune
Les jeux d'un mouvement de nuages
Le chant minéral d'un vieux poêle de bois
La forme des montagnes au-dessus de ta vie
Le nom de tes chatons roulant
Près de tes pieds la naïveté de la mousse
Au bord d'une falaise
Les sommets qui ne se nomment plus
(comme les chiens perdus qui
N'ont jamais de nom)
La longue torche du premier espoir
La pupille fauve et sombre qui
Déborde une paupière seule
Le train qu'on regardait passer
Et ses sables chantants que nous
Glissions entre nos doigts
Quel oiseau de nuit Charlot n'a pas
Fracassé l'or des derniers penseur!
Quel oiseau de cendre et de nuit n'a pas
Traîné son aile sur une table desservie!
Mais les tables desservies, Charlot
Portent les voix des hommes qui on faim
Nourrir l'oiseau de nuit pour lui donner le
Souffle humain des enfants chez les grands
Salut, Charlot! Salut bonhomme!