Aurore boréale
Une sublime aurore boréale
Effleure de son voile de
Mousseline mon regard
Nous avançons dans ce désert de glace
Sans nourriture hélas
L'hiver, les proies se font rares
Le froid engourdit mes membres
Mes forces ont prit la fuite
Des flocons perlent sur mes
Longs cheveux de cendre
Je ne suis que le fossile d'un chef inuit
Mes pieds chuchotent aux bottes
En peau de phoque, qui les enveloppent
Des épopées d'une autre époque
Où j'étais vif, souple et imprudent
Maintenant, je ralentis mon groupe
Je suis trop lent mon reflet me dévisage
Chaque soir, la vieillesse me donne le sein
Mes regrets m'apparaissent comme des mirages
Mon histoire touche à sa fin
J'ai appris à mes enfants
À construire des igloos
À chasser l'ours blanc
Le morse et le caribou
Mais leur estomac noué prédit que
Dans très peu de temps
Ils m'abandonneront devant la porte du néant
Ma mère a vieilli
Sa peau s'est plissée, ses épices ont terni
Les pages des livres d'images
De son enfance sage ont jauni
Statue voûtée sans appétit dans
Une cantine aseptisée
Au menu: soupe de nostalgie, purée d'ennui
Compote ratée
Chaque matin, elle fait sa toilette
Quand elle oublie: on la gronde
Elle est entrée dans la ronde
De cette garderie pour ancêtres
Ma mère est une bougie que je laisse fondre
Seule, dans une petite chambre sombre
Elle traîne son silence dans ce long couloir
Son indolence rédige sa carte de
Condoléances dans l'isoloir
L'automne dans le jardin
Adossé à un mur de brume
Elle contemple des arbres centenaires
Qui se dénudent
Mes visites gomment son air maussade
Pour mieux colorier ses paummettes
Elle se parfume, fait la poussière
Et m'offre, à chaque fois, des gaufrettes
Mais elle m'effraie, sans faire exprès
Lorsqu'elle me parle
Elle utilise l'imparfait
Ma maman voit, depuis son lit
Des avions décoller
Le mien part à midi, je fuis
Elle a l'air désolée