L’abri
J’écoute la voix de mon rêve…
Pour aller à toi je longerai le fleuve aux furieuses vagues beiges
Je retrouverai les chemins effondrés aux flaques troubles
Qui reflètent des paysages inconnus
Mes pieds seront alourdis de boue
Et ma marche vers toi sera lente et pénible
Comme celle des nuagеs
Aux contours bizarres et aux teintеs mauvaises
Qui ceinturent la terre oppressée
Nostalgique de soleil
Les mouettes au vol pesant
Tournoieront au-dessus des flots tourmentés
En poussant des cris plaintifs ;
La pluie froide humectera mes lèvres arides
Et le vent, qui cingle mon visage nu
Et brutalise mes cheveux dénoués
Arrachera par nuées les feuilles mourantes des arbres
Qui semblent protester en de grands gestes pathétiques
De toutes leurs branches malades
Et j’irai, j’irai dans le crépuscule d’orage
Vers l’abri chaud où tu m’attends ;
Quand j’entrerai dans la maison
Tu prendras dans les tiennes mes mains raidies
Et tu laisseras ma tête lasse reposer sur ton épaule
Nous resterons ainsi, au coin du feu
Sans transports, sans paroles
Mes sanglots seuls te diront
Combien longtemps j’ai trébuché dans les sentiers obscurs
Et toutes les pierres cruelles qui ont écorché ma chair
Eux seuls t’apprendront combien de temps j’ai jeté
Dans la nuit vaste mon cri de détresse et d’abandon
Ne me demande pas des gestes fous de passion ;
Enveloppe de tes bras d’amour mon corps exténué et tremblant
Et que je sente ton cœur battre le rythme
De ta vigilante tendresse
Le Bonheur a tes yeux